Automne by Nielsen Jan Henrik

Auteur:Nielsen Jan Henrik [Nielsen Jan Henrik]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Albin Michel
Publié: 2013-06-09T22:00:00+00:00

19

Il est là, dehors. Les mots se frayent un chemin jusqu’à elle à travers son sommeil. Il est là, dehors. Nanna ouvre les yeux et se retrouve nez à nez avec Fride.

– Il est là, dehors, répète Fride à voix basse. Sur un arbre.

Nanna jette un regard autour d’elle sans saisir aussitôt où elle se trouve. Tout son corps lui fait mal. La couette sent le vieux et le renfermé. Meubles et miroir sont couverts d’une épaisse couche de poussière. Le soleil scintille dans la pièce comme un rayon d’étoile. Nanna referme les yeux.

– Je suis trop fatiguée. Je veux dormir. On verra plus tard.

– Non, murmure Fride, faut que tu te réveilles. Il est là, juste devant nous. Il nous regarde.

– Qui ça ?

– Ben, lui.

– Qui ça, lui ?

– Le garçon. Le garçon d’hier.

Nanna ouvre les yeux.

– Où est-il ?

– Assis dehors, je te dis.

– Et qu’est-ce qu’il fait ?

– Il est perché dans un arbre et il nous guette.

– Depuis combien de temps ?

– Je me suis réveillée tôt. Je voulais pas te réveiller, mais comme je m’embêtais, j’ai regardé par la fenêtre. Et il était là.

– Il t’a vue ?

– Je crois pas.

– Tu n’aurais pas dû aller à la fenêtre, dit Nanna, qui se laisse glisser par terre et se met à ramper sur la moquette. Remets-toi au lit et restes-y.

Nanna lève prudemment la tête au-dessus du cadre de la fenêtre, et jette un œil dehors. En bas, elle distingue une petite place bordée de quelques arbres, un parc pour enfants au centre. Autour, de modestes magasins aux vitrines encrassées.

– Je ne le vois pas, murmure-t-elle.

– Il était là, quelque part.

Nanna se force à rester complètement immobile. Elle attend. Soudain, elle a l’impression que l’une des branches de l’arbre le plus proche revient à la vie, car elle voit se tendre un bras en haillons. Le garçon est quasiment impossible à repérer, ses hardes noires ne formant qu’un avec les rameaux. Il a un beau visage, et un voile de tristesse dans les yeux. Elle observe plus attentivement ses prunelles sombres, et l’espace d’une seconde, leurs regards se croisent. Il la fixe droit dans les yeux. Son visage se durcit, il prend un air hostile. Nanna se jette à terre.

– Viens, Fride. Il m’a vue. On doit vérifier la porte.

Elles rampent dans l’entrée, plongée dans la pénombre, jusqu’aux chaises et à la commode coincées devant la porte.

– Il ne pourra pas entrer, déclare Nanna.

Elles restent assises sans rien dire un long moment. Nanna sent le découragement s’emparer d’elle. Elles n’y arriveront jamais. Et papa ? S’il était déjà mort ? Elle refuse de penser à ce qui peut arriver.

– Faut qu’on fasse quelque chose, souffle-t-elle à Fride.

Celle-ci acquiesce.

– On va essayer de descendre dans la cour et de partir par un autre porche, dit Nanna. J’espère qu’on va réussir à se faufiler dehors sans qu’il nous voie. Regarde s’il est encore assis sur la branche.

Nanna va chercher leur sac à dos pendant que Fride rejoint la fenêtre à quatre pattes.

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